Référentiel de compétences professionnelles de la profession enseignante
À l’automne 2020, une nouvelle version du référentiel des compétences professionnelles de la profession enseignante a été publiée30. En réponse aux revendications des organisations autochtones en éducation, le ministère de l’Éducation y affirme que « les enseignantes et les enseignants sont des acteurs incontournables de la réconciliation avec les peuples autochtones et les sollicite pour qu’ils priorisent le renforcement de la compréhension interculturelle, de l’empathie et du respect mutuel » (p. 14). De plus, la formation enseignante n’est pas uniquement une question de formation initiale, mais aussi de mise à niveau constante pour assurer aux enfants la meilleure formation. C’est pour cette raison que le référentiel parait être un outil de choix pour cette visée.
Bien que tous s’accordent pour dire que les milieux scolaires font partie intégrante du processus vers un mieux-vivre ensemble31, il semble que cela soit plus facile à dire qu’à faire. À partir de certaines compétences ciblées, une analyse permet de voir de quelles façons la valorisation de perspectives et de réalités autochtones peut s’inscrire.
Compétence 1
Agir en tant que médiatrice ou médiateur d’éléments de culture
Cette compétence amène la personne enseignante à donner du sens aux contenus vus en classe en faisant des liens culturellement significatifs pour l’élève qui se reconnaît agissant ainsi comme un catalyseur de motivation et d’engagement dans l’apprentissage.
Cependant, devoir enseigner des éléments appartenant à une culture qui ne nous appartient pas, voire qui nous est étrangère et pour laquelle les préjugés et la discrimination sont encore bien présents, est certes un défi. La curiosité, l’évaluation des sources d’informations et l’humilité seront les plus grandes alliées des personnes enseignantes dans ce processus. Il n’y a pas de secret ni de recette miracle, les personnes enseignantes devront se nourrir, découvrir et apprécier les cultures des Premiers Peuples. Une liste non exhaustive de ressources est d’ailleurs proposée dans la section Activités pour les accompagner dans cette quête.
Compétence 7
Tenir compte de l’hétérogénéité des élèves
Cette compétence met l’accent sur l’identité propre des élèves, sur leur confiance en eux et sur le respect de leurs différences. Elle incite les personnes enseignantes à prendre en compte les besoins, les défis et les capacités des élèves à travers différents moyens :
Les élèves autochtones ont une culture très différente de celle des Allochtones. Ils ont parfois de la difficulté à se retrouver dans le système éducatif. Le fait de prendre en considération cet élément et de mettre tout en œuvre pour que les élèves autochtones puissent être fiers de ce qu’ils sont est un moteur de persévérance scolaire et de réussite éducative pour eux.
Les élèves autochtones ont une culture très différente de celle des Allochtones. Ils ont parfois de la difficulté à se retrouver dans le système éducatif. Le fait de prendre en considération cet élément et de mettre tout en œuvre pour que les élèves autochtones puissent être fiers de ce qu’ils sont est un moteur de persévérance scolaire et de réussite éducative pour eux.
Compétence 8
Soutenir le plaisir d’apprendre
Cette compétence interpelle directement les personnes enseignantes pour qu’elles fassent en sorte que les élèves développent un sentiment d’appartenance envers l’école. Pour y arriver, elles peuvent utiliser des références culturelles et le vécu des élèves. Une connaissance accrue des cultures des Premiers Peuples, une curiosité envers leurs expériences de vie et une ouverture d’esprit sont nécessaires, spécialement lorsque les élèves ont l’impression que l’école québécoise n’a rien pour eux. Tout comme la compétence 7, la huitème agit elle aussi comme un levier supplémentaire pour soutenir la persévérance scolaire et la réussite éducative.
Compétence 10
Collaborer avec la famille et les partenaires de la communauté
Pour les Premiers Peuples, la famille élargie et la communauté ont un rôle très important à jouer dans l’apprentissage des enfants, un apprentissage qui se poursuit d’ailleurs tout au long et au large de la vie d’une personne. Il est donc important pour les personnes enseignantes de prendre en compte cette dimension culturelle et de collaborer avec tous ceux et celles qui gravitent autour de l’enfant, dans l’intérêt de ce dernier. Les centres en milieu urbain qui offrent une multitude de services peuvent aussi devenir des accompagnants dans ce processus de valorisation des perspectives autochtones et dans le mieux-être des élèves autochtones. Ils seront également d’excellents alliés pour créer un lien avec les familles et les communautés basé sur la confiance et le partage.
Compétence 11
S’engager dans un développement professionnel continu et dans la vie de la profession
Les cultures autochtones sont en pleine ébullition. Les différentes nations essaient de se reconnecter à leur culture, de conjuguer tradition et modernité, ce qui fait que les choses évoluent à vitesse grand V. Les multiples commissions d’enquête et les découvertes de milliers de dépouilles sans sépulture d’enfants autochtones au cours des dernières années ont accentué ce phénomène tout en sensibilisant la population à la cause autochtone. Le besoin de mieux connaître, de réapprendre l’histoire en considérant le point de vue autochtone et de valoriser les cultures s’est accéléré de façon exponentielle. Ce qui se dit aujourd’hui n’aura peut-être plus la même résonance demain. Il est donc important de se tenir à jour, et ce, de manière constante. Il en va de même pour les avancées dans la recherche en éducation, qui pourront apporter des idées et outiller les personnes enseignantes dans le processus de valorisation des perspectives autochtones et l’ajustement de leurs pratiques enseignantes.
Compétence 13
Agir en accord avec les principes éthiques de la profession
Cette compétence est en lien direct avec la confiance qu’éprouve la société envers la profession enseignante. Les principes éthiques de la profession rappellent l’importance du rôle de la personne enseignante dans la déconstruction des mythes, des préjugés et des situations d’exclusion ou de discrimination. Il en va de même pour les biais inconscients et l’ethnocentrisme, qui peuvent venir teinter l’interprétation des éléments d’une autre culture.
Par ailleurs, à maintes reprises dans l’histoire, les Premiers Peuples ont eu à vivre des rapports difficiles avec l’éducation telle qu’elle est perçue conceptuellement par les Allochtones. Le lien de confiance est à bâtir autant avec l’établissement d’enseignement que dans la relation maître-élève. Cette compétence est en partie la clé de la réussite.
C’est par l’entremise de cette compétence que la personne enseignante a le devoir de considérer chacun de ses élèves dans leur intégrité, de faire de la classe et de l’école un milieu respectueux et sain, et d’adopter des pratiques enseignantes qui favorisent l’épanouissement de tous les élèves et qui mèneront ultimement vers un mieux-vivre ensemble.
Compétence 15 32
Valoriser et promouvoir les savoirs, la vision du monde, la culture et l’histoire des Autochtones
La compétence 15, même si elle n’apparaît pas dans le référentiel de compétences du ministère, reste prise en compte par certains établissements d’enseignement supérieur pour lesquels la formation des Autochtones est une priorité. Cette compétence est le fruit du travail de l’Institut Tshakapesh, du Conseil en Éducation des Premières Nations et du Centre de développement de la formation et de la main-d’œuvre huron-wendat. Elle va plus loin que le référentiel de compétences professionnelles de la profession enseignante en apportant des précisions sur ce que souhaitent les Premiers Peuples en matière d’éducation tout en répondant concrètement aux appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation. Les auteurs de la compétence 15 rappellent que « les élèves autochtones connaîtront le succès lorsque les approches pédagogiques valoriseront aussi les modes d’apprentissage ainsi que les connaissances et les perspectives autochtones » (CEPN, p. 1), en plus d’y énoncer des moyens concrets pour y arriver.
À travers ces compétences, les valeurs d’estime de soi, d’empathie, de respect et d’ouverture reviennent de façon constante. Elles sont à la fois un guide pour les personnes enseignantes, mais aussi les fondements pour le développement de relations de nation à nation bienveillantes et durables.